Régis Blugeon, DRH de Saint-Gobain : « Construire une Tour pour 2700 collaborateurs ne se résume pas à valider des maquettes ! »
Plus qu’un nouveau siège, la nouvelle Tour Saint-Gobain à La Défense, sera un emblème et une vitrine du savoir-faire du groupe. Haute de 165 mètres, elle rassemblera 2700 collaborateurs/-trices actuellement répartis sur différents sites de la région parisienne. Elle accueillera également un showroom ouvert au public. Régis Blugeon, DRH-France de Saint-Gobain, nous explique l’accompagnement humain mis en place pour conduire ce projet, bien avant l’emménagement dans les nouveaux locaux.
Pourquoi construire un nouveau siège pour Saint-Gobain ?
Nous souhaitons réunir les collaborateurs des différentes filiales du groupe (Point P, Isover, etc.) au sein d’un même bâtiment dont nous serons les seuls occupants. Aujourd’hui, certains sont déjà à La Défense, d’autres à Suresnes ou dans Paris. La Tour, d’une surface de 49 000m² et de 46 étages, sera livrée en septembre 2019. Je vois le chantier, qui a démarré il y a trois ans, avancer depuis ma fenêtre de bureau ! Nous voulons aussi que les nouveaux aménagements apportent plus de transversalité et de collaboratif au sein des équipes. Ce projet est ainsi l’occasion de réfléchir et de changer nos manières de manager, et de travailler ensemble.
Concrètement, cela passe par la fin des bureaux fermés et des postes attribués…
Oui, et ce n’est pas rien ! Ce sera le cas pour l’ensemble des collaborateurs, des managers et de la direction, à l’exception de quelques fonctions sédentaires (comptables, juristes, RH, etc.). Personnellement, étant 60% de mon temps en déplacement, je n’aurai plus de bureau individuel. Nous allons fonctionner avec une logique de macro-zoning. Telle société occupera tels étages, et à chaque étage, il y aura 4 quartiers distincts dans lesquels seront réparties les équipes. Nous allons aussi fortement développer le digital et mener une politique de papier responsable pour en réduire la consommation.
Comment embarquer les équipes dans ce projet d’envergure ?
Depuis l’origine du projet, nous communiquons beaucoup, notamment via des outils modernes. Une fois par trimestre, j’organise un chat pour présenter les avancées et répondre aux questions des collaborateurs en direct. Je ne choisis pas les questions, je réponds, dans l’ordre, à celles qui ont obtenu les plus de votes en ligne. Nous avons aussi mis en place des groupes de travail thématiques : lieux de restauration, salles de réunion, nouvelles technologies, organisation du travail, jardins, espaces de travail collaboratif… Chaque groupe est constitué de personnes aux fonctions et aux statuts hiérarchiques variés. Cela nous a permis de définir des chartes tenant compte des besoins des salariés, des spécificités de la culture de chaque entreprise mais aussi des contraintes techniques et financières du projet global.
Quid des instances représentatives du personnel (IRP) ?
Là encore, nous les avons impliquées dès le départ. Nous avons beaucoup de filiales, donc beaucoup de partenaires sociaux. Le projet ne se fait pas contre eux, ou malgré eux, mais avec eux pour améliorer les conditions de travail de tous les salariés. Je les rencontre deux à trois fois par an pour évoquer les avancées, répondre à leurs questions, expliquer les changements… C’est un processus de transformation et d’apprentissage en continu. Je ne me cache jamais derrière des questions, si je ne sais pas y répondre j’explique pourquoi et quand je pourrai le faire. Surtout, j’essaie de ne jamais laisser de zones de silence. Les discussions avec les IRP ont débouché sur la négociation d’un accord qualité de vie au travail. Il a été signé à l’unanimité en novembre 2017 et a permis de clarifier des questions comme la charge de travail, le temps de transport et le télétravail.
Qu’est-ce que vous a apporté le cabinet Empreinte Humaine ?
Tout d’abord, une finesse de compréhension du processus de transformation. Empreinte Humaine a mis en place une Étude d’Impact Humain (EIH), réalisée deux fois par an auprès d’un certain nombre de nos collaborateurs et de nos managers, sur l’impact humain du projet. Cela nous permet de mesurer leur compréhension, les freins aux changements, l’évolution des réticences… Empreinte Humaine m’aide également à piloter ce projet en me faisant prendre du recul par rapport au projet immobilier en tant que tel. Construire une Tour pour 2700 collaborateurs ne se résume pas à valider des maquettes ! Ce cabinet m’alerte sur les dimensions fortes qui ressortent des études, décode les ressentis des équipes et nous apporte ainsi de la proximité avec elles. C’est important pour moi d’avoir le soutien d’un cabinet spécialisé et impartial qui place l’humain au centre. Les ateliers managers qu’ils ont déployés sur l’accompagnement humain du changement ont aussi été d’une grande utilité pour développer les pratiques managériales qui favorisent l’appropriation des changements.
Quels sont, selon vous, les conditions de réussite d’un tel projet ?
Il est important d’embarquer le plus grand nombre possible de personnes en respectant les corps intermédiaires et syndicaux. Nous avons, par exemple, des réseaux au sein du groupe, comme celui des assistantes ou encore Win (Women in Network). Nous les avons tous vus. On réussit à engager les gens en donnant du sens au projet, en expliquant pourquoi nous le mettons en place. Il est ensuite fondamental d’être aligné entre la finalité du projet et la manière dont on le conduit. La transformation se vit dès les prémices du projet, et continuera une fois l’installation dans nos nouveaux locaux réalisée. Enfin, le temps que prend un tel chantier doit devenir un allié, au lieu d’être perçu comme une source de stress ou une contrainte.
Si vous n’aviez qu’un seul conseil à transmettre à des entreprises s’engageant dans la même aventure que vous, quel serait-il ?
Anticiper au maximum ! Cela demande de se faire accompagner, de bien communiquer, de dialoguer afin de mener le projet de manière participative.
Avis d’Empreinte Humaine
La stratégie de Saint-Gobain en matière d’accompagnement humain du changement, montre bien que c’est à travers l’écoute, le dialogue et l’explication qu’il est possible de faire progresser les préoccupations des personnes. Alors que ne pas considérer les personnes n’amène que des blocages et des résistances. Cette ouverture au dialogue collectif, individuel et même à distance a permis de rapprocher les préoccupations de chacun et d’influencer la conception du projet. C’est ce que demandent les salariés et les IRP comme nous l’expliquons dans cet article.