Introduction – Mise en contexte
Dans un contexte où la parole se libère en entreprise, les dispositifs d’alerte deviennent des outils essentiels de protection. Mais que se passe-t-il une fois une alerte reçue ? Comment la traiter efficacement tout en respectant les obligations légales et les équilibres humains ?
Ce webinaire visait à clarifier les étapes du traitement d’une alerte : de la qualification des faits à la posture des enquêteurs, en passant par les bonnes pratiques à sécuriser. Un sujet sensible, souvent complexe, mais crucial pour préserver un climat de travail sain.
De quoi parle-t-on ? Comprendre ce qu’est une alerte et les obligations associées
L’alerte ou signalement désigne toute remontée de faits pouvant relever de la violence au travail : harcèlement moral ou sexuel, discrimination, manquements à l’éthique… L’employeur, tenu à une obligation de sécurité (article L.4121-1 du Code du travail), doit intervenir lorsqu’un salarié signale une situation pouvant mettre en jeu sa santé ou sa sécurité.
Les canaux de signalement :
- RH, managers (hors mis en cause), élus CSE, référents harcèlement
- Plateformes internes (ex. dispositifs de whistleblowing anonymes)
- Droit d’alerte des élus, qui doivent alors être associés à l’enquête
Encadrement légal :
- Loi Sapin II : confidentialité, accusé de réception sous 7 jours, informations à fournir sous 3 mois
- Jurisprudence : obligation d’enquête en cas de suspicion sérieuse de faits relevant du harcèlement ou de la discrimination, même sans emploi explicite de ces termes
L’enquête est-elle systématique ?
Non. L’enquête n’est pas toujours la réponse adaptée. L’employeur doit évaluer la nature et la gravité des faits :
- Pas d’enquête si les faits sont avérés et documentés (ex. SMS explicites → sanction possible immédiate)
- Pas d’enquête si les faits sont isolés et ne relèvent pas juridiquement du harcèlement (ex. dispute ponctuelle)
- Enquête nécessaire si les faits, s’ils sont confirmés, pourraient caractériser une situation de harcèlement, mais que les preuves sont insuffisantes
⚠️ Ne pas diligenter une enquête alors qu’elle est justifiée engage la responsabilité de l’employeur, même si les faits ne sont pas confirmés in fine.
De la réception à l’analyse : quelles étapes clés ?
- Analyse initiale & mesures conservatoires
- Choix du mode d’enquête
- Audition de la personne plaignante
- Audition des témoins
- Audition de la personne mise en cause
- Rédaction du rapport d’enquête
- Mise en œuvre des mesures adaptées
Zoom sur la posture des enquêteurs
L’enquêteur·rice n’est ni juge ni shérif. Sa posture repose sur :
- Neutralité, écoute active, bienveillance
- Préparation des entretiens dans un lieu confidentiel, adapté
- Capacité à contenir les émotions sans projeter ses propres filtres
- Disponibilité mentale : pas d’enchaînement d’entretiens sans temps de respiration
- Explication claire du cadre, des droits et des suites
Les bonnes pratiques dans l’enquête
🔹 À éviter :
- Manque de réactivité (délais trop longs)
- Impartialité mise en doute (liens hiérarchiques, conflits d’intérêts)
- Procédure floue ou mal cadrée
- Absence de formation des enquêteurs
- Représailles ou pression post-enquête
🔹 À sécuriser :
- Transparence sur le processus : qui fait quoi, qui a accès à quoi
- Entretiens en binôme (recommandé en interne)
- Possibilité pour les salariés de relire et corriger leurs PV
- Accord de confidentialité signé au démarrage des entretiens
- Communication claire sur le périmètre et la finalité de l’enquête
Conclusion
Le traitement d’une alerte en entreprise est un exercice d’équilibriste entre rigueur juridique, sens de l’écoute et respect des personnes. Pour les intervenantes, quatre piliers sont à retenir :
- Réactivité
- Impartialité
- Transparence du processus
- Mobilisation d’un réseau pluridisciplinaire
Empreinte Humaine remercie chaleureusement les nombreux participants pour la richesse de leurs questions et leur engagement sur ce sujet sensible